mer. 7 juil. 21 17:52
Une cata cet essai? En gros, la première question que j'ai posé en retirant mon casque: «heuu, vous en vendez combien après les essais?» (sous entendu: il arrive de ne pas repartir avec?)
Donc oui, une cata, un piège.
Parce que il y a une banderole qui défile en haut du site avec un logo rouge en forme de médiator, et surtout parce que j'ai surtout essayé une 939SS et une V2, seules à ce moment-là à remplir mon cahier des charges, je vais surtout orienter le retour d'expérience par rapport aux 2 Ducati en plastique (note, ce n'est pas péjoratif, je préfère les motos en plastique avec des bracelets, ça fait partie de mes critères).
Pour résumer, je cherchais un jouet utilisable tous les jours, un truc qui a du caractère, qui ne pousse pas à rouler à 200 pour commencer à esquisser une levée de commissure de lèvre. Et je préfère une conduite avec des bracelets, sur l'avant. Et de temps en temps (si possible d'en trouver, du temps) ressortir la combarde pour compter si il y a autant de vibreurs blancs que rouges sur quelques boucles de bitume bien lisses.
Premier contact: les italiens ont un vrai talent pour industrialiser un design leché (même si l'un des designers géniaux de Ducati est français

). À mon goût, on n'atteint pas la pureté des lignes de la V2, mais quand même: ça a de la gueule, et pas un truc tarabiscoté à la Yam ou Kawa.
Et ces coloris… rhaaa… la moto d'essai est acid gold. Ce jaune est pas moche en photo. En vrai, au soleil, le mat produit un je ne sais quoi: elle est splendide cette couleur.
Détail qui plaira aux panigalistes: la ligne d'échappement sort sous le moteur, de part et d'autre. Comme une 899 ou une V2
Au guidon:
On est entre une V2 et une SuperSport 939S, un peu plus près de la V2. Par contre, autant la V2 il faut s'habituer à la position des pieds très hauts, autant le reste m'a paru très naturel, j'ai de suite trouvé ma place. Idem pour la SS, mais là, la position plus droite, ce coté roadster habillé et braceleté haut la rend facile. En statique, à ma surprise, je n'ai pas trouvé de suite ma place sur la RS. En fait, au début, j'ai collé le réservoir, et sa forme assez anguleuse m'a un peu gêné.
En fait, en roulant, je me suis naturellement mis correctement sur la selle, sur l'arrière, et là, bah oui, c'est nettement mieux.
En détaillant les commandes au guidon:
- point fort pour Aprilia, la sélection du mode de conduite, c'est à la place du bouton start (le coupe circuit fait aussi office de démarreur), et on peut changer la carto à tout moment, même gaz ouvert (il suffit de couper et réaccélérer si on choisit un mode en étant gaz ouvert)
- originalité : sur une machine sportive, il y a un régulateur de vitesse au comodo gauche! Pourquoi pas, en vrai, c'est un truc qui, quand on ne l'a pas, on s'en passe, et quand on l'a, on trouve ça quand même confortable. Astuce: quand on passe la moto en mode race, le +/- de ce régulateur est reconverti pour régler à la volée le traction control! Pas con, même très bien vu. Juste, et là les marketeux ont remis leur nez dans la fiche technique: on parle d'une moto de 100ch. Certes très légère, mais aujourd'hui on se sent obligé de mettre une bardée d'assistances électroniques. Indispensables sur les monstres de plus de 200ch pour 190kg, AMHA nettement moins justifiés pour la petite RS.
- loupé: on a un régulateur de vitesse, chouette! Et … heuu… le warning? Hey, il est où le bouton? Ah bah en 2021, Aprilia sort des motos (la Tuono est équipée à l'identique pour ça) sans warning. Il existe sur la V2 même si cela fait pas loin de 15 ans que Ducati met le bouton du mauvais coté, au moins il y est.
Ah si, un truc lu sur un site, que j'ai eu également: j'ai accroché plusieurs fois ma botte au cale-pied de la V2, ça m'a rassuré de le lire d'un journaleux.
Roulage:
Bon, autant le dire de suite: bien sûr que le moteur de la V2 est intouchable. Il développe un tiers de puissance en plus, et je lui ai trouvé du caractère, beaucoup d'«effet ouaouh» , avec un coté rond tranquille à 4000tpm, ça ronronne sagement mais repart quand même avec une vigueur agréable. Passé 6000tpm ça part, et passé 8000tpm faut la tenir car ça repart de plus belle, c'est impressionnant dans le sens littéral du terme. Et le shifter, c'est du beurre, d'une douceur et vélocité… miam.
Bref, une moto qui donne le sourire sans avoir besoin de taper dedans à des régimes de fraise de dentiste pour avoir les sensations qu'on peut rechercher en moto, et donc, sans avoir à atteindre des vitesses folles (même si, au final, ça défile vite: ce que je veux dire, c'est que ce twin en L est incomparablement moins pousse au crime qu'un 4 pattes
Donc, mettons le moteur de la V2 de coté, parlons 939 et RS.
J'avais enchainé l'essai de la V2 puis le lendemain la SS. Exactement le même circuit, même équipement. En fait, j'ai roulé plus (trop) vite, plus fort, bref plus dangereusement avec la SS. Pourquoi? Parce qu'elle m'a paru linéaire et facile. La V2 demande à l'accompagner pour l'inscrire en virage, la SS, bof, non, comme un roadster ça passe tout seul. Et donc, le moteur… déception. Linéaire. Coupleux oui, mais c'est en cherchant à me faire plaisir que je me suis retrouvé à rouler trop vite.
Donc, ce fameux «demi RSV» (qui n'en n'est pas tout à fait un puisque alésage et course ne sont pas les mêmes, le reste, en partie oui c'est commun)? Comme l'ont écrit plusieurs journaux, il en donne plus que ce qu'il annonce. Sur le papier, il est inférieur de 15ch et en couple au SS. En réalité, niveau sensations, c'est l'inverse. J'ai eu l'impression d'une SS monotone, et d'une RS qui a plus que les 95ch (la moto d'essai n'est pas une 100ch) annoncés.
Déjà on peut les comparer y compris en bruit (même par rapport au V2: moins bruyant, un peu plus de raisonnance de boite à air, mais un bruit très très similaire) car le twin en ligne est calé à 270° … contre le calage de vos twin en L à 90°, on peut parler de similitudes techniques!
En pratique, ce n'est pas une ER6 ou autres du genre: il n'aime pas être sous les 3000tpm même si l'injection moderne compense bien les a-coups. À 4000, ça vibre un peu, il y a une bonne reprise (il est considéré pointu comme le V2 … ah mince, j'avais dit qu'on ne le comparait pas

), à 5000 il est à l'aise, le shifter devient doux (en dessous, il génère des à coup d'injection, et le sélecteur est «lourd» sur le pied, en tout cas sur la mienne, qui n'a que 200km, ça accroche un peu. Et à 7000tpm, les courbes de couple et de puissance se croisent. Et là…

la montée en régime est nettement plus franche, le bouilleur est rageur. Un peu dans l'esprit d'un 2 temps ou d'un vieux 4 pattes style 1000FZR qui partait d'un coup à 9500tpm, toutes proportions gardées bien sûr. D'ailleurs, je me suis surpris durant un dépassement à taper le rupteur (11500tpm) et à ce moment là, de prendre un à coup dans le guidon, synonyme d'une patte un peu en l'air (j'ai fait l'essai en mode individual, en laissant l'ABS arrière, et en désactivant tout le reste, pour ne garder que les vraies capacités de la machine. Note: les modes sont vraiment bien pensés, en ville, passer en mode commute rend la machine autrement plus onctueuse et moins on/off).
Pour résumer,
- V2: moteur / boite génial, irréprochable (sauf le chauffage central

), parfait à mon goût
- SS: confort, mais je n'ai pas du tout accroché à son comportement de GT légère, vive, facile, mais sans saveur
- RS: j'aime utiliser le mot «pétillant». Un embrayage très doux mais un shifter qui accroche un peu à la descente et demande 5000tpm pour des montées onctueuses, et un moteur qui se transforme à 7000tpm pour coller la banane sous le casque
Partie cycle:
Là, on peut comparer les 3, car la RS est une bonne synthèse des 2 autres.
Elle est très légère, et très courte, ce qui en fait un vrai vélo. Même en manipulation à l'arrêt, elle est légère. En roulant, avec sa rigidité, elle est très très précise, par contre, attaquer sur une route bosselée me demandera de comprendre le mode d'emploi: attaquer proprement demande un peu de lecture, et je trouve que c'est un bon point (on se lasse plus vite d'un truc dont on a fait le tour en une heure, non?). En fait, de part sa position entre la V2 et la SS, on retrouve un touché proche de la V2, très proche même, mais autant j'ai trouvé que la V2 demande à être emmené par les épaules et les jambes (somme toute ce qui est assez scolaire), la SS et la RS virent toutes seules. La SS parce que la position aide à l'accompagner naturellement, la RS, parce que un vélo ça se couche tout seul (183kg les pleins fait, avec un centre de gravité franchement bas)
Pour le moment, je ne peux pas juger de l'amortissement, d'autant que la clef à ergot n'est pas livrée
Budget:
Pour le moment, vous l'aurez compris, mon classement après une heure d'essais est évident
1) la V2, en routier sportif, une machine étonnamment polyvalente, joueuse, ergonomique, et sans radicalité excessive.
2) la RS, je cherchais une joy machine, c'en est clairement une. Comme la V2, en plus raisonnable.
3) la SS. Là, sur le papier j'étais emballé, en essai, je ne cache pas ma déception. Je viens d'une Triumph 900 Sprint Sport (pour ceux qui ne connaissent pas, c'est la 900 Dayto du JoeBar Team, en demi carénée), je ne cherche plus une sport GT, et même, ma vieille lourde donf m'amusait plus que cette SS. Je compare clairement la SS aux VFR, là oui, celui qui a aimé la VFR va adorer la SS.
Alors, pourquoi pas signer la V2?
Parce que 18300€ + le budget entretien annuel très élevé + les assurances qui font payer aussi cher que pour une 1299R ou une V4R, alors qu'on a eu le COVID qui nous a empoisonné notre recherche et achat immobilier + frais surprise dans notre nouvelle maison -> ça ne passait plus. Douche froide.
La RS, c'est 11000 prix catalogue, sur lequel j'ai eu remises et accessoires également remisés, le coût d'entretien nettement moins élevé… parmi les motos jouets, passionnantes, elle a été le choix raisonnable.
Voilou.
J'oublie forcément beaucoup de choses, ce topic est là pour rajouter ce qui peut intéresser quelques visiteurs du forum
